Carême vient de quarante : il s’agit de se priver de quelques bonnes choses pendant 40 jours avant le dimanche de Pâques. La pratique se base sur l’abstinence et véhicule une théologie sans rapport avec la vie de Jésus. Elle a pour origine l’idée que l’abondance nous éloigne de Dieu. Renoncer aux bienfaits du créateur permettrait de nous rapprocher de lui. Mais la Bible dit exactement le contraire.
Une spiritualité sans privations
La Bible dit exactement le contraire. Au chapitre 20 du livre de l’Exode (versets 22 à 24), Dieu vient bénir son peuple pendant les fêtes offertes en son honneur. C’est ce que la Bible appelle des fêtes de communion (souvent désignées par l’appellation fautive « sacrifice » de communion). Avec ses disciples, Jésus n'a jamais jeûné ni avant Pâque ni à un autre moment.
Le chiffre quarante symbolise une période longue. Elle débouche sur une vie meilleure et (ou) accompagne un processus de maturation. Avant de partir en mission, Jésus passe 40 jours dans le désert. Mais, selon les évangiles, il ne ressent aucune privation. Lorsqu’il a faim, il converse avec le Diable puis les anges lui servent un repas (Matthieu 4.11). Selon l’évangile de Marc, les anges le servent pendant tout ce temps. La privation n’a pas sa place dans le récit de ces quarante jours.
Une belle symbolique
Par contre, la symbolique du chiffre quarante peut nourrir notre spiritualité. Elle indique un temps difficile et complexe marquant un épisode de la vie. Nul besoin en effet de s’imposer des privations. L’existence se charge de le faire sans nous demander notre avis. Matérielles, elles peuvent aussi être affectives, relationnelles, etc. Nous vivons toutes et tous des périodes où les événements de la vie nous coupent l'appétit. La Bible invite à garder espoir dans les temps de privation et à tenter d’en tirer du positif. Le récit des évangiles (Matthieu 4, Marc1 et Luc 4) le confirme : Jésus est passé par une période existentielle désertique avant de se lancer dans sa mission. Ces récits montrent de manière imagée qu’il a su éviter les remèdes faciles, pourtant si tentants.
Mais nous pouvons décider de nous ménager du temps pour vivre autre chose ou pour vivre autrement. Il ne s’agit pas de s’abstenir de quelque chose mais d’avoir un répit dans notre vie ordinaire pour l’agrémenter d’un projet ponctuel. C’est pour cela que les Églises proposent, par exemple des campagnes de carême. Il y a maints d’autres exemples bien sûr. En tout cas les récits de Jésus dans le désert nous invitent à éviter les perspectives faciles.
Vivre autrement pendant un temps nous procure alors de la satisfaction et, lorsque cela se termine, les anges viennent nous servir.