Genèse 1 à 12
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Genèse 1 à 12

Dieu crée les humains et il voit que c’est vraiment une très bonne chose (Genèse 1). Puis en il invente le pardon : il avait promis la mort à Adam et Êve mais il leur pardonne et leur donne même des vêtements pour les protéger (Genèse 2 et 3). Puis il invente la justice et la musique (Genèse 4), la bonté (Genèse 6), l’espoir (Genèse 7) et la paix (Genèse 8). Il crée le bonheur (toujours Genèse 8) avec la stabilité des éléments permttant de produire tout ce qui est nécessaire à la vie.


Quitter père et mère

Genèse.2.18 à 25

C’est pourquoi l’homme quittera père et mère pour s’attacher à sa femme, et ils deviendront tous deux un seul être (Verset 24).

Le peuple de Dieu s’est constitué à partir de tribus nomades dans lesquelles il n’était pas question de quitter père et mère. Par la suite, dans les familles sédentaires, cela n’était pas devenu plus courant. Les générations vivaient en général sous le même toit. Alors pourquoi ce curieux verset qui ne reflète pas la vie concrète de ce temps ? Sans nul doute, nous sommes ici dans un récit symbolique destiné à protéger l’amour.

Dès l’origine, Dieu se pose en protecteur des amoureux. Ils doivent quitter leur ancienne vie pour construire leur propre existence. Ici, l’image du père et de la mère désigne la vie dont les amants doivent faire le deuil pour vivre leur amour. Et surtout, il protège les amoureux contre les intrusions de leur entourage, celui des parents et autres gens bien intentionnés. Sous couvert de protéger l’un ou l’autre, leurs interventions s’avèrent souvent nuisibles.

Et ces comportements nocifs ont traversé les millénaires. 

Vivre

Genèse.3.1à13

La femme vit que les fruits de l’arbre étaient agréables à regarder, qu’ils devaient être bons et qu’ils donnaient envie d’en manger pour acquérir un savoir plus étendu. Elle en prit un et en mangea. Puis, elle en donna à son mari, qui était avec elle, et il en mangea, lui aussi (verset 6)

Cela ne pouvait pas durer. C’était agréable de se promener jour après jour dans un environnement merveilleux, d’être l’un avec l’autre en n’ayant d’autre but que d’être ensemble. Bien sûr, il y a des projets. Mais quand on a l’éternité devant soi, on peut remettre au lendemain ce qu’il est possible de faire le jour même. C’est beau l’amour ! Avec comme seul bonheur d’être tout simplement l’un avec l’autre. C’est comme les amours de vacances.

Mais les vacances ne durent qu’un temps. Il faut ensuite retrouver le réel. Chercher à comprendre sa vie, se rendre compte de sa vulnérabilité, affronter le quotidien, relever des défis, bref : vivre ! L’humain va désormais avoir de grands projets. Il les accouchera dans la douleur et il les construira à la sueur de son front. Mais il sera fier de ses réussites, fera de ses échecs des occasions d’apprentissage, quittera son statut d’assisté pour devenir le partenaire du Dieu créateur.

Et ce Dieu l’accompagnera désormais en le bénissant.

Construire le futur

L’homme, Adam, nomma sa femme Êve, c’est-à-dire Vie, car elle est la mère de tous les vivants (v20).

Ni Adam, ni Eve ne sont des prénoms. Adam symbolise l’humain, homme et femme. Eve comme le veut l’hébreu, symbolise la vie, l’existence, la destinée. Voilà donc l’humanité appelée à vivre sa destinée. Sur le plan grammatical l’hébreu ne connait pas les temps passé, présent et futur. Sur le plan symbolique, ce récit parle de l’avenir. L’humain doit faire le deuil de son rêve d’une vie idéale. Il ne pourra jamais y entrer comme le dit le symbole des chérubins qui gardent l’entrée du jardin au verset 24. L’humain doit exister dans la vie réelle. Une fois ce deuil accompli il va pouvoir cultiver le jardin créé par Dieu. Ce récit est celui de l’élévation. L’élévation de l’humain au rôle de partenaire de Dieu dans le développement de sa création.

Parfois tenté de regarder en arrière imaginant les temps passés où tout était mieux il doit cependant construire le futur.

Dieu invente la justice

Genèse.4.1 à 16

Caïn dit à Abel, son frère : « ... » Et c’est quand ils sont au champ, Caïn se lève contre Èbèl, son frère, et le tue.

(Verset 8)

Dans notre récit nous avons d’abord la situation initiale, avec les deux frères différents l’un de l’autre. Puis se noue le drame : Caïn tue son frère. Pourquoi ? A cause de la jalousie ? C’est sans doute bien plus complexe. Le texte original hébreu a une faute. Il introduit un discours direct Caïn dit à Abel et il continue, non pas en reprenant les paroles de Caïn, mais en expliquant qu’ils sont au champ. Les traductions disent, en général, Caïn parla à Abel, corrigeant ainsi la faute. Pourquoi les copistes du texte original ont-ils gardé cette faute ? Parce qu’à l’origine des faits il a d’abord d’une rupture de la communication. Voilà pourquoi la Bible omet d’écrire les paroles de Caïn.

Et la conséquence de cette non communication est terrible puisqu’il s’agit d’un meurtre. Au pays de la loi du talion, Caïn mérite la mort lui aussi. Mais Dieu refuse une loi mortifère basée sur la vengeance. Caïn subit les conséquences de son acte : il doit errer loin de son pays. Mais ce verdict permet à la vie de rebondir.

Ce jour là Dieu invente la justice.

La jalousie, un mal absolu

Genèse 4.1 à 16

Le Seigneur mit alors sur Caïn un signe distinctif, pour empêcher qu’il soit tué par quiconque le rencontrerait (Verset 15b)

Dieu aimait Caïn. Il le lui montre en le protégeant. L’amour de Dieu pour Caïn a sans doute commencé bien avant le meurtre de son frère. Mais Caïn ne s’en est pas rendu compte. Pourquoi ? Difficile à dire. Qui peut connaître les raisons profondes de ses propres aveuglements. Notre Caïn s’en laissé dominer par sa jalousie. Pour la première fois le péché apparaît dans la Bible, comme une force dont les humains sont victimes. Le péché est là avant nous, nous n’y pouvons rien. Il entraîne l’humanité dans des actions malheureuses. Caïn tue son frère et doit fuir, la peur au ventre. 

La jalousie est la première manifestation du péché. Première apparition dans le temps, ou première dans le sens la plus importante ? J’opterais volontiers pour la seconde interprétation. La jalousie a ceci de pervers qu’elle se drape bien souvent dans une légitime indignation faisant de l’autre la cause de sa propre violence. Et Dieu gère, avec bienveillance les résultats désastreux de nos erreurs.

Dieu invente le beau

Genèse.4.17 à 26

Son frère s’appelle Youbal. C’est l’ancêtre de tous ceux qui jouent de la cithare et de la flûte (Verset 21).

Selon ce texte l’humanité bénéficie de trois types de métiers fondamentaux. Dans la société nomade de ce temps, ceux qui élèvent des troupeaux, symbolisent ceux qui apportent la nourriture. Il y aussi les forgerons, c’est-à-dire ceux qui produisent les objets dont nous avons besoin, de nos jours le texte dirait peut-être : les industriels. Troisième besoin fondamental : la musique. Aux besoins de bases agricoles et industriels s’ajoutent des productions dont la pénurie n’empêche pas de vivre.

L’humain n’a pas seulement besoin de vivre, il doit aussi exister. Sinon la vie serait une simple survie. Il doit vibrer au son du beau, à l’idée du bon, à la joie du merveilleux. Ce récit présente un Dieu qui connaît les besoins humains de base mais comprend aussi leur besoin d’avoir davantage. Il respecte ainsi notre être profond et approuve notre désir de profiter des belles choses de la vie.

C’est pour cela que, ce jour-là, Dieu invente la musique.

Dieu invente la bonté

Genèse 6.5 à 22

Noé est un homme juste (Verset 10b)

Il en faut un regard perspicace pour déceler un homme juste alors qu’il n’y en a pas uns pour relever les autres. C’est plus facile de détecter un comportement violent dans un monde pacifique. Les mouvements intégristes regroupent une poignée d’individus. Pourtant ils font la une des journaux bien davantage que les centaines de millions de croyants vivant leur foi de manière pacifique. Et dans la vie personnelle, les souffrances dont nous sommes victimes imprègnent davantage les esprits que les joies pourtant bien présentes.

Heureusement Dieu est plus grand que l’humanité. Il ne se laisse pas aveugler par les violences. Il fait penser à l’aigle. Ce rapace plane haut dans les cieux mais sa vue excellente repère de toutes petites proies. Dieu scrute ainsi l’humanité et il voit, au milieu du mal, ce qui est porteur de vie.

En valorisant Noé, individu perdu dans la masse des humains, Dieu invente la bonté.

Chercher l’étincelle de bien

Genèse 6.5 à 22

Mais aux yeux de Dieu, l’humanité était pourrie : partout ce n’était que violence (Verset 11).

Si la Bible ne fait pas de l’humain l’origine du péché, il n’en demeure pas moins à la fois victime et acteur de la violence. L’humain se laisse bien souvent dominer par le péché, comme l’affirme la destinée de Caïn. Dans notre verset Dieu jette un regard plus que critique sur l’humanité.

Ce sont bien les comportements des humains entre eux qui sont à l’origine du courroux divin, pas du tout les comportements des humains vis à vis de Dieu. Infidélités, idolâtries, blasphèmes, tout ce que les humains imaginent comme conduites hostiles à Dieu ne semble pas aiguiser sa colère.

Non, ce sont bien les attitudes des humains entre eux, qui déplaisent profondément au Créateur. Mais Dieu trouvera une solution. Il y avait un homme juste au milieu de tout cela. Oui il faut parfois chercher avec patience la petite étincelle de bien qui existe partout dans le monde. Dieu a eu cette patience, même si, à ses yeux, l’humanité était pourrie.


Générosités contre dureté

Genèse 7.1 à 16

 Prends avec toi sept couples de chaque sortes d’animaux purs, mais un couple seulement de chaque sorte d’animaux impurs (Verset 2).

La distinction entre les animaux purs et impurs semble curieuse à notre époque. Nous le savons de nos jours : chaque espèce participe au cycle du vivant et elles contribuent toutes à la biodiversité. Mais du temps de Noé, le souci écologique n’était pas de mise. Alors pourquoi cette distinction ? D’autant plus que le chiffre sept a, dans la Bible, une grande valeur symbolique.

Les animaux purs symbolisent sans doute tout ce que nous percevons comme positif dans la création et les impurs le négatif à l’œuvre dans ce monde, voire dans nos existences. Ce texte tout en affirmant le souci de Dieu pour la diversité des espèces, a une portée symbolique beaucoup plus grande. Selon ce verset, les générosités de ce monde sont bien plus nombreuses que ses duretés.

Oui, Dieu nous donne sept fois plus de choses heureuses que de choses malheureuses.

Dieu invente l’espoir

Genèse.7.11 à 24

Il reste seulement Noé et ceux qui sont avec lui dans le bateau (Verset 23b).

Dieu est têtu. Il veut réellement sauver la vie coûte que coûte. Voici 18 versets (du 6 au 24) qui décrivent la destruction totale de la vie terrestre. Tout y est noir : les eaux souterraines comme celles du ciel se répandent et détruisent tout sur leur passage. Notre époque connaît, grâce aux médias, la manière dont inondations et tsunamis peuvent tout détruire sur leur passage. Nous pouvons donc bien percevoir les dégâts qu’auraient pu causer le tsunami radical décrit par la Bible.

Les quelques mots tapis à la fin du verset 23 détonnent complètement par rapport à la tonalité générale de ce passage. Le contraste n’en est que plus saisissant. Ce récit fait penser à ces photos qui montrent une petite fleur se frayant un passage dans un univers totalement bétonné.

Un petit signe positif dans un environnement en apparence entièrement négatif.

Ce jour-là Dieu a inventé l’espoir.

Valoriser le bien ne supprime pas le mal mais c’est à notre portée et nous contribuons ainsi à l’œuvre de Dieu.

Dieu invente la paix

Genèse 8.1 à 12

Vers le soir [la colombe] revient auprès de Noé. Dans son bec, elle tient une jeune tige d’olivier (Verset 11a).

La colombe avec le rameau constitue un symbole de paix universellement connu même dans les milieux peu au fait avec la culture biblique. En fait, il s’agit d’une promesse de paix, un signe de paix, un horizon vers lequel tendre car Noé n’a pas encore vu la terre ferme. Mais la paix est justement sans doute davantage un horizon vers lequel se diriger qu’un lieu que nous pouvons atteindre avec nos humaines manières.

Ce récit possède la même structure que celui de Caïn et Abel : une situation initiale, avec la terre et ses habitants. Puis se noue le drame : la violence envahit le monde. L’humanité subit les conséquences de son attitude.  Mais Dieu refuse de répondre par une violence absolue à cette situation désespérante.

La vie rebondit car Dieu a inventé la paix.

Dieu invente le bonheur

Genèse 8.13 à 22

Tant que la terre durera, on sèmera et on récoltera. Il fera froid, il fera chaud. Il y aura la mauvaise saison, il y aura la belle saison. Il fera jour, il fera nuit. Ce sera toujours ainsi (Verset 22)

Dieu crée les humains et il voit que c’est vraiment une très bonne chose (Genèse 1). Puis en il invente le pardon : il avait promis la mort à Adam et Êve mais il leur pardonne et leur donne même des vêtements pour les protéger (Genèse 2 et 3). Puis il invente la justice et la musique (Genèse 4), la bonté (Genèse 6), l’espoir (Genèse 7) et la paix (Genèse 8). Il complètera encore son œuvre en en inventant la diversité des humains (Genèse 11). Ils vont désormais pouvoir profiter de toutes ces inventions du créateur.

Mais avant de créer la diversité, il lui reste encore à inventer le bonheur. C’est chose faite avec la stabilité des éléments. Ainsi les humains peuvent produire ce qui est nécessaire à leur vie.

Et depuis ils utilisent tout cela pour valoriser cette création de Dieu : le bonheur.


Eloge de la diversité

Genèse 11.1 à 9

Babel symbolise l’échec du totalitarisme. Tout rêve d’unifier l’humanité pour édifier quelque chose de grandiose est voué à l’échec. La vie c’est d’abord la diversité, multiplication des espèces, des races, des langues, des idées. La vie évolue du simple au complexe. Unicellulaire au départ elle éclate de plus en plus. Cette explosion, Dieu l’a voulue. C’est comme un arbre qui grandit en multipliant branches et rameaux.

La diversité suscite conflits, incompréhensions et drames. Mais, lorsqu’elle se conjugue avec harmonie, elle devient bouquet grandiose et merveilleux. Le destin du vivant consiste à tendre vers cette apothéose. Babel, c’est la première étape de cette destinée. Souvent la fête de Pentecôte est considérée comme le contraire de Babel. A pentecôte Pierre parle à des populations venues des quatre coins du monde et parlant différentes langues, et elles comprennent ce qu’il leur dit.

Or le récit de Babel c’est la condition, l’origine, et le constant rappel, qu’une œuvre durable, ne se construit pas sur le nivellement, mais sur la mise en valeur pacifiée des différences.

Ainsi, la fête de Pentecôte est l’aboutissement du récit de Babel.